Lulu en vedette, ce n’est que justice :-)) Je suis super fière de faire partie de tes copines, et d’avoir été la première à laisser un commentaire sur le blog de Lulu, il y a déjà… quelques années :-). Bises.
Entretien avec Gloria Godard, dite Lulu Sorcière !
- De Elisabeth
Aujourd’hui, dans le cadre de notre rubrique sur les acteurs du monde de la généalogie, nous accueillons Gloria Godard. Vous la connaissez peut-être sous le nom de Lulu Sorcière.
Médecin devenue maman à plein temps, elle est membre de plusieurs associations et groupes généalogiques (Cercle Généalogique Poitevin, Généalogie Entraide 86, CCHA et Société des Sciences de Chatellerault).
Voici l’autoportrait d’une passionnée qui pratique la généalogie avec, dit-elle, ‘beaucoup de modestie, de l’humour et beaucoup d’enthousiasme.’
Pouvez-vous vous présenter en quelques lignes ?
Je m’appelle Gloria Godard, j’ai 56 ans, originaire de la région parisienne, je vis depuis 24 ans à Prinçay hameau d’un petit village du Poitou.
De formation médicale, j’ai arrêté mon activité professionnelle à la naissance du quatrième de mes six enfants. J’ai la joie d’être grand-mère depuis bientôt un an. Je fais de la généalogie depuis presque dix ans. J’ai beaucoup travaillé sur la branche poitevine de mes enfants. J’ai progressivement élargi mes horizons aux archives des petits villages de mon département.
Je suis aussi passionnée par l’histoire de la maternité à travers la littérature, les arts, les archives. J’aime écrire, raconter les histoires.
J’ai un faible pour les sorcières : je les collectionne sous toutes les formes : les poupées (savez-vous qu’elles protègent les enfants de la maison ?), les histoires, les archives…
Quelle-est votre activité actuelle ?
Famille nombreuse, famille heureuse : ça m’occupe mais ça me laisse du temps pour la généalogie. Depuis plus de deux ans, je vais régulièrement aux archives départementales de la Vienne, j’y ai ma place, mes p’tites habitudes. J’y élargis mes horizons. J’ai aujourd’hui trois pôles d’intérêt principaux :
– Les petites affaires criminelles de la Vienne, que je répertorie depuis deux ans et que je raconte sur le blog. J’ai dépouillé la série LSUPPL, les affaires de la période révolutionnaire, et je progresse dans les deux sens de l’histoire doucement et sans stratégie particulière.
– Les archives insolites de la Vienne, que je répertorie depuis un an environ. Cette base compte actuellement plus de mille entrées. A mes lectures personnelles, s’ajoutent celles de bloggeurs amis qui me confient leurs trésors, ainsi que celles des colistiers de mon club de généalogie GE86. Nous répertorions toutes les curiosités de la météo aux grossesses multiples, en passant par les baptêmes de cloche, les crimes ou les naissances singulières.
– L’histoire de la maternité à travers les arts et les archives.
Comment est né votre intérêt pour la généalogie ?
La passion est née à partir de la sauvegarde des photos de famille. Je les ai scannées pour confier un exemplaire à chacun, je les ai répertoriées, et nous les avons fait parler. C’est un projet familial. Mon beau-père, ma mère, mon beau-frère ont mis des noms sur les visages les plus anciens, des dates sur les événements. Beaucoup d’anecdotes, d’épisodes historiques ont été racontés à partir de ces photos. Nous avons créé un forum familial privé pour partager ces trésors.
Au total, quatre générations se sont intéressées à l’aventure, en interrogeant, en lisant, en racontant, chacun a participé à sa manière. C’était très enrichissant et très émouvant. Un de mes neveux a lancé l’idée d’un arbre généalogique pour mettre un peu d’ordre dans tout ça. C’était parti ! Moi qui perd si vite mes ancêtres au-delà des frontières, j’ai ouvert les registres de mon village, je remontais le temps avec une facilité déconcertante.
Les miens viennent d’Espagne, de Turquie, je perds vite la trace de leur petite histoire, mais je les retrouve dans la Grande.
Quel est l’origine de votre nom de famille ?
Les Godard viennent de Genouillé, petit village du sud de la Vienne. Ils sont journaliers et se marient à une portée de charrette de La Combe, leur hameau. Voici l’explication que me donne la France Pittoresque au patronyme de mes enfants : Le nom Godard , s’il faut en croire Bacon Tacon, est le même que celui de God-art (le dieu fort), donné, dit-il, à Hercule, que les païens imploraient dans les accouchements difficiles (Origines celtiques, tome II, p. 401-402).
Cependant, il parait plus probable que ce nom a été formé de gaudere, se réjouir, se donner du bon temps. Il signifiait autrefois un homme adonné aux plaisirs de la table, habitué à prendre toutes ses aises. Mariée à un obstétricien, et de caractère enthousiaste, les deux interprétations me conviennent !
Quant à mon propre patronyme Pino, il est d’origine espagnole (mon père était catalan, ma grand-mère madrilène et mon grand-père andalou). Il fait référence à un bel arbre dont mon père disait qu’il ne penchait ses branches vers le sol que pour mieux protéger les oiseaux des intempéries.
Quelle est votre découverte la plus intéressante ?
Tout ce que j’ai appris est passionnant. Et pourtant je n’ai pas le sentiment d’avoir fait UNE grande découverte. Sans doute parce que depuis toute petite, j’ai toujours aimé les vieilles photos, les vieux papiers, j’ai adoré écouter les aventures fabuleuses de ma grand-mère espagnole, de mon grand-père turc, et de ma mère… française. Des histoires d’exil, de guerre, de luttes, de liberté, d’intégration. Certains se plaignent aujourd’hui du silence des anciens. Mais pour parler, il faut tendre l’oreille. Je pense avoir été cette oreille. Mes recherches m’ont permis d’étayer, d’illustrer, de détailler, d’expliquer de tracer le beau parcours de la famille de mes enfants. Toujours avec une immense tendresse, beaucoup de respect, d’indulgence, d’admiration pour chacun et dans la limite de l’émotion des anciens qui nous entourent encore.
Mes deux plus grandes émotions généalogiques : ma visite à l’OFPRA et le dossier de naturalisation de mon grand-père contenant ce petit papier qui scelle le destin d’une famille : la décision de la commission de révision des naturalisations qui en 1943 maintient la nationalité française de mes grands-parents acquise en 1930.
Ma gourmandise généalogique reste l’affaire du Gilet Rouge. Au hasard des pages feuilletées, l’assassinat de Charles Barreau à Prinçay, dans mon village en 1796. Une formidable enquête, ma première enquête, en famille, sur le terrain et aux AD86, avec, tout au bout de la lecture l’incroyable récompense de cette pièce à conviction toujours en place : un morceau d’étoffe du gilet de l’assassin ! Les petites affaires criminelles de la Vienne n’allaient plus me quitter ! Il y a quelques mois j’ai réussi à rattacher la belle Hortense, épouse de la victime, à l’arbre de mes enfants. Ça n’a étonné personne, depuis plus d’un an ce personnage de roman faisait déjà partie de la famille !
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre blog ?
En fait j’ai… trois blogs 😉
Le blog « Lulu Sorcière Archive » est né du prolongement du forum familial. J’ai eu envie de partager mes découvertes, mes étonnements, mes questionnements au-delà de la famille pour les archives les plus anciennes, un peu moins personnelles.
J’ai eu envie de mettre à disposition de tous ce que je découvrais. Sans prétention, avec humour, bonne humeur et surtout enthousiasme. Le blog est le support idéal. Il autorise une certaine liberté de ton, la variété des sujets, la réactivité. J’essaie de faire court, simple, de partager mon étonnement. Il m’arrive d’ouvrir mes pages à d’autres, une manière de mettre le pied à l’étrier. Grâce à ce blog, j’ai rencontré des passionnés, retrouvé des cousins, embarqué des amis dans mes aventures.
Le blog de « Lulu Sorcière » c’est un peu de moi au jour le jour, un peu d’humour, d’humeur, des émotions, d’autres passions (Marie Curie, les découvertes médicales).
Le blog « Lulu Matern’Elles » consacré à l’histoire de la maternité, en particulier les accouchements à travers la littérature, le cinéma et les archives.
Un conseil pour les généalogistes débutants ?
Un seul conseil : partagez ! Racontez, même partiellement, simplement. Sortez de vos tiroirs, vos découvertes, vos interrogations, vos émotions. Au-delà de vos propres racines, laissez-vous porter par le hasard de vos lectures. Cultivez l’étonnement. Plus qu’une quête familiale, la généalogie est la source d’un formidable enrichissement culturel.
Parfois, là où vous ne les attendez plus, vos ancêtres vous font signe : par une fenêtre dérobée, une serrure de cachot, un témoignage, un hiver trop froid, un mail, un commentaire dans un blog…
Vous perdez vos ancêtres dans les nuits noires de l’Histoire ? Ce n’est pas grave ! Faites comme moi, adoptez ceux des autres !
Fred Coussay
23 janvier 2013
Magnifique ! Tout simplement !